Les JO de Barcelone 1992 vus par Olivier Boivin, médaille de bronze olympique

Portrait Olivier Boivin — photo FFCK M. Chapuis

Olivier Boivin, est né en 1965. Il donne ses premiers coups de pagaie à Pontivy avec Jean-Pierre Lafont. Après deux années au CAPS (Centre d’Activité Physique et Sportive) en canoë C1 et C4, il reste s’entraîner dans son club. Finaliste aux championnats du monde junior avec Didier Labat, il s’engage vers le haut niveau. Après l’année d’armée en 1986 au Bataillon de Joinville, il intègre l’équipe de France. D’abord associé en C2 avec Daniel Aubert pour les mondiaux de 1987 à Duisbourg, il fait équipage avec Didier Hoyer de 1989 jusqu’à leur médaille de bronze aux JO de 1992 à Barcelone. Il termine sa carrière en 1996 en ayant remporté 7 médailles aux championnats du monde en C2 ou C4 de 1989 à 1995.

 

 

 

 

 

L’année de préparation avant les Jeux Olympiques de Barcelone en 1992.

Associé à Didier Hoyer depuis 1989, notre année 1991 avait été magique. En effet, aux mondiaux à Vaires-sur-Marne en 1991 nous gagnons deux médailles : argent en C2 1 000 m et bronze en C2 500 m. Notre bateau était donc mature pour envisager de belles perspectives pour les JO de 1992.

Mais rien ne va se passer comme prévu… . Didier se blesse en fin d’année 91 et la convalescence et la reconstruction de l’équipage prennent du temps. Nous suivons, avec notre entraîneur Alain Lebas, le programme «routinier» de ces années-là : en décembre stage commun avec le collectif 2 ; en janvier, stage de ski avec la PO (préparation olympique) ; en février, stage en Guadeloupe et en mars-avril stage en Floride de 6 semaines avec de bonnes nations comme les Danois, les Canadiens…

Hoyer Boivin — FFCK 92

Les premières coupes du monde sont compliquées, notamment avec une proposition de changement de bateau qui ne nous convient pas… Nous optons alors pour conserver notre C2 Oméga de Struer avec lequel nous avons de bons repères. Mais après la coupe du monde de Szeged fin mai sans médaille, nous avons fait une grosse remise en question avec Alain Lebas. Notre entraîneur nous a remobilisés et l’effet rebond a joué avec la mise en place d’un vrai projet commun jusqu’aux JO.

Il faut dire aussi que nous étions dans de bonnes conditions au plan professionnel et matériel pour nous entraîner. Depuis 1990, j’avais une Convention d’Insertion Professionnelle (CIP) avec la ville de Paris et Didier était professeur d’EPS détaché à l’INSEP.

 

La préparation terminale avant les JO

Un mois avant les Jeux, nous avons fait un vrai stage commando à Angers. Alain nous a poussé à aller très loin dans nos ressources. Le stage terminal s’est déroulé à Temple sur Lot avec les kayakistes norvégiens, canadiens, australiens, suédois… Nous avions de bonnes sensations, la confiance revenait. L’impasse sur la cérémonie d’ouverture à Barcelone nous a permis de rester concentrés. Le responsable de la base de Temple, Alain Brisse, a quand même organisé une cérémonie en interne avec toutes les équipes présentes. Un moment très sympa.

Cérémonie d’ouverture Temple/Lot — photo coll S.Kleinhenz

 

Le village olympique et la préparation de la course

Les JO de Barcelone ont été mes seuls Jeux vécus en tant qu’athlète et il me reste des impressions incroyables. Du monde, des stars, et toutes les commodités pour que cela se passe bien. Un vrai «village de vacances» géant… mais nous n’étions pas en vacances ! Heureusement que l’encadrement est intervenu pour que nos colocataires du même appartement, les tennismen fêtards ; Forget, Santoro et Leconte, qui avaient terminé leurs compétitions, partent vite.

Le C2 Hoyer-Boivin sur l’eau à l’entraînement à Barcelone. — Photo FFCK

Nous connaissions bien le bassin Casteldefelds de Barcelone et ses particularités car nous avions participé en 1991 aux compétitions préolympiques, juste après les mondiaux de Vaires. Petit bassin canal de 1 200 mètres, exposé au vent, sans possibilité d’envisager un échauffement en deux temps classique. La mise en place d’un protocole bien déterminé a été très utile avec l’utilisation de machines à pagayer.

 

Notre course

Sur le 500 mètres, nous finissons 6e en passant par les demi-finales. Nous nous sentions dans le coup.

Résultats de la course sur 500 m.

Sur le 1 000 m, nous passons directement en finale après les séries derrière les Roumains mais en battant l’équipage hongrois. Cela nous a permis de pouvoir bien récupérer et d’avoir 3 jours off. On partait chercher le podium et étions prêts à jouer avec les Danois et les Roumains…

Effectivement, en finale, sans vent, nous avons réalisé une course stratégique et très régulière. Nous savions qu’il fallait suivre les favoris, les Allemands Ulrich Papke et Ingo Spelly  à la ligne d’eau juste à notre droite. Nous terminons à 3 dixièmes des Danois Arme Nielsson et Christian Frederiksen.

Résultats de la course sur 1 000 m.

 

Après la course

Ce podium (Allemagne, Danemark et France) concrétisait en fait la domination de nos 3 équipages depuis 4 ans au niveau mondial. Et cela cassait les habitudes de voir deux pures nations de l’Ouest dans les médaillés. Nous étions très heureux de partager ce podium avec des copains avec lesquels je reste toujours en contact par les réseaux sociaux.

Podium Hoyer-Boivin médaille de bronze. — Photo FFCK

Ensuite, j’ai eu la sensation d’une pression qui s’en va, comme pour une cocotte-minute… Le passage de la bulle à l’euphorie, mais sans excès… J’ai pu retrouver ma famille et tout le clan de Pontivy présent avec le maire et tous les amis du club et de la Ligue de Bretagne emmenée par  Jean-Pierre Laffont et René Trégaro.

Le protocole s’est enchaîné avec le repas avec le président fédéral Marcel Venot et le président d’EDF, le champagne au club France sur le bateau Club Méd du CNOSF avec les médaillés du canoë-kayak slalom : Sylvain, Jacky, Franck et Wilfrid.

Sans oublier la cérémonie de clôture, superbe !

C’était aussi la fin d’un cycle et d’une histoire avec Didier Hoyer qui, à 31 ans, arrêtait sa carrière.

Les deux médaillés du C2 après les JO pagaies en croix. — Photo Jean Louis Fel

 

L’après Jeux olympiques et les retombées de la médaille olympique

La médaille m’a permis de rester en contrat avec la Mairie de Paris qui m’a formé (formation en alternance sur l’eau) et m’a employé jusqu’à ce que je trouve un emploi. Après un bilan de compétences initié par la FFCK, j’ai trouvé un travail en 1997 en Guadeloupe sur une base nautique. Et après, c’est une autre histoire…  Mais toujours en relation avec ma carrière d’athlète ! Un contact avec Hervé Madoré, alors responsable de la préparation olympique pour m’inciter à préparer le professorat de sport puis une rencontre improbable avec Alain Gagnard (CREPS de Vichy) aux Saintes qui m’a accompagné pour le professorat de sport en 2000. Et finalement, grâce au DTN de l’époque, Antoine Goetschy, j’ai pu intégrer la fédération sur un poste d’entraîneur avec un contrat de préparation olympique, et ce jusqu’aux JO de Pékin en 2008.

En conclusion : j’ai pu écrire mon histoire et ma carrière de sportif dans un contexte ultra favorisant mais également grâce à des rencontres humaines incroyables.

 

Olivier Boivin (avril 2024)

Témoignage recueilli par Sylvaine Deltour

 

Les témoignages n’engagent que leurs auteurs

 

Revenir aux témoignages