Les JO de Londres 2012 vus par Arnaud Hybois et Sébastien Jouve

PRÉSENTATIONS

Arnaud en interview à Londres. — Photo FFCK-KMSP

Arnaud Hybois : Il est né en janvier 1982 à Pontivy et son club est le club Nautique Evel-Blavet de Baud (Morbihan). Le baldivien a été champion du monde de K1 descente en 2004 et 2006 et accessoirement champion d’Europe. Mais quand un descendeur a un projet sportif de haut-niveau, la descente n’étant pas une discipline olympique, il paraît plus logique et abordable de se réorienter vers la course en ligne plutôt que vers le slalom. C’est ce qu’Arnaud a fait au pôle France de Toulouse où il a continué sa carrière sportive en course en ligne. Il a participé aux JO de 2008 (demi-finaliste), 2012 (finaliste) et 2016 (finaliste) comme son acolyte Sébastien. L’olympiade 2008-2012 aura été exemplaire. Il est triple champion du monde en équipage (2 fois en K2 200 et 1 fois en K4 1 000) en 2010 et 2011 avec Sébastien entre autres, 3e aux Mondiaux 2009 et second en 2014 en relais K1 4×200 m. On dit de lui qu’il est un « guerrier » en course, qu’il a un rapport poids-puissance phénoménal, qu’il est un fin technicien et qu’il ne laisse rien au hasard.

 

Sébastien en interview à Londres. — Photo FFCK-KMSP

Sébastien Jouve : Il est né en décembre 1982 à Mont-Saint-Aignan et son club d’origine est le Canoë-Club-Normand à Rouen (Seine Maritime). Il rejoindra ensuite le Stade Porte Normande CK de Vernon (Eure) et enfin le Canoë Kayak club de Louviers (Eure). Son père Gilbert était un bon kayakiste des années 1970 (BJ promotion 1970), il l’a initié très tôt au maniement de la pagaie. Sébastien est également passé par la section sport-étude de Caen dirigée par Hervé Duhamel, l’INSEP et les pôles France d’Angers puis de Toulouse avec Jean-Pascal Crochet comme coach. C’est dans ces structures qu’il s’est étoffé musculairement entre autres pour en arriver finalement à être un sprinter. Sébastien a le même palmarès international qu’Arnaud avec en supplément un titre de champion d’Europe U23 en K1H 500 (2005), deux troisièmes places en K2 500 (2013) et K2 200 (2014) avec Maxime Beaumont. Il dit lui-même que son envergure de bras et son excellent rapport poids-puissance optimisé par une musculation méthodique représentaient des atouts.

Leurs palmarès sont impressionnants. Ils se sont construits à force de travail. Ils partent donc pour Londres en ayant le statut de favori en K2 200 m.

 

LA PRÉPARATION POUR LONDRES, BON PRÉSAGE !

Extrait interview d’Arnaud du 10-08-2012 pour Ouest-France : « Aux JO de Pékin, je m’alignais en K1 sur 500 m mais je ne pratiquais vraiment le kayak en ligne que depuis un an. Cette fois, à Londres, j’aurai tout le confort d’une préparation olympique complète en K2 sur 200 m. Notre titre aux championnats du monde 2011, avec Sébastien, nous a permis d’obtenir notre quota olympique. »

Sébastien et Maxime lors des séries du K2 500 m aux JO de Pékin. — Photo FFCK-R. Thiébaut

Après avoir passé plusieurs années à s’entraîner ensemble sur le Pôle France de Toulouse, la préparation automnale en cette saison olympique s’est déroulée à Caen pour Sébastien et toujours à Toulouse pour Arnaud.

Nous avons fait en sorte de nous retrouver très régulièrement lors de plusieurs regroupements soit à Toulouse, soit avec le reste de nos camarades de l’équipe de France durant l’hiver. Notamment un stage de préparation physique en Afrique du Sud en janvier et un long stage de kayak au Maroc en février.

Enfin, le dernier stage de préparation final s’est déroulé au Temple-sur-Lot (Lot-et-Garonne) où nous avions l’habitude de séjourner pendant les saisons estivales depuis quelques années.

 

LES SÉLECTIONS EN 2012

Durant cette année olympique, nous étions automatiquement sélectionnés pour une pré-saison internationale à la suite de nos deux titres mondiaux obtenus en 2010 et 2011 sur la distance de 200 m.

Pour confirmer cette pré-sélection olympique, nous devions réaliser une performance sur la 1re manche de coupe de monde de Poznan (Pologne). Ce sera chose faite en remportant cette manche.

Après avoir été sacrés champions du monde en K4 en 2010, l’année 2011 s’avérera désastreuse avec un échec cuisant et traumatisant aux mondiaux. Pas de quota ni de sélection olympique dans ce bateau. Il ne nous restait que le K2 200 m pour pleinement nous exprimer en tant que champions du monde sortants.

Pourtant, la suite de cette pré-saison internationale sera moins dominatrice que les précédentes dans l’épreuve du K2 200 m puisque nous ne terminons que 3es de la seconde manche organisée à Duisbourg. Le mois suivant nous terminerons 1ers en K2 500 m mais seulement 4es en K2 200 m aux championnats d’Europe organisés à Zagreb. Un doute s’installe. On remet en question son matériel…

Le site l’Equipe.fr résumera ainsi les choses : «  Hybois-Jouve ont subi de relatifs revers mais, depuis, ils se sont infligés un long stage à Temple-sur-Lot pour affûter leur forme. »

 

LES COURSES OLYMPIQUES, UN ENFER ?…

Le village olympique. Le site de compétition étant situé à 40 kilomètres à l’ouest de Londres, nous étions logés dans un village olympique « annexe » avec l’ensemble des kayakistes, à proximité immédiate du site de compétition. Nous avions déjà vécu cette configuration lors de l’édition précédente à Pékin loin de l’ambiance du village olympique principal.

Le bassin olympique. Nous avions découvert en septembre 2011 lors d’une course de « test pré-olympique », le plan d’eau de course situé dans l’ouest londonien. Le « Dorney Lake » est situé à Eton, face au prestigieux château de Windsor.

Les 10 et 11 août 2012. Notre entrée en lice dans ce tournoi olympique fut difficile. Dès les premiers coups de pagaies en phase de qualification (série et demi-finale), nous avons été mis en difficulté sur notre phase de départ. Nous terminons 3es de la demi-finale et nous décrochons péniblement une place en finale. Dans le journal Le Télégramme, Arnaud dira : « Notre mise en action reste compliquée. On a pourtant travaillé les départs, essayé ce que l’on pensait être le mieux. Mais on se rend compte qu’on prend cher dans la première partie de la course et qu’on n’a pas le second souffle qui faisait notre force ces deux dernières années. »

Le K2 lors de la demi-finale. — Coll. C. Rouffet

Heureusement, le lendemain en finale, nous réalisons une meilleure prestation que la veille, surtout la fin de course. Néanmoins ce ne fut pas suffisant pour monter sur le podium. Nous ne terminerons que 4es en étant dominés par les équipages russes, biélorusses et anglais. Le sprint court se joue tellement au centième voire au millième de seconde que la moindre faiblesse ou erreur se paie cash. Pourtant, la performance n’est pas ridicule à 6 dixièmes du podium (un demi-bateau) mais il y avait tellement d’attentes envers nous… C’est ça les Jeux, un rendez-vous à ne surtout pas manquer !

Le K2 lors de la finale. — Coll. C. Rouffet

Le journal Ouest-France titrera : « Un grand coup de pagaie sur la tête » et « Hybois et Jouve n’ont jamais été dans la course en K2 200 m, où ils ambitionnaient pourtant l’or. »

L’Agence France Presse écrira : « Arnaud Hybois et Sébastien Jouve, 4e en K2 sur 200 m, n’arrivaient pas à se défaire d’un sentiment de gâchis. » et rapportera leurs propos d’après-finale : « On savait qu’on aurait des problèmes au départ, on a tenté des choses, mais il était difficile de tout révolutionner en une nuit a reconnu Jouve qui avait changé de pagaie et repris celle des titres mondiaux. »

Le journal L’Équipe développera : « Cette désillusion, c’est la faute à ce départ, faiblesse chronique depuis le début de leur association en 2010, mais devenue rédhibitoire en cette année olympique. Dès la série et la demi-finale de vendredi, Hybois-Jouve avaient deviné que l’enjeu était dans cette mise en action. »

Arnaud complètera : « En vingt-quatre heures, on a essayé de rectifier un peu le tir, mais on savait qu’on ne pouvait pas tout révolutionner ».

Sébastien qui avait changé de pagaie pour disposer d’un bras de levier moins important expliquera : « J’ai l’impression qu’elle nous a donné plus d’air à la fin. Mais ça n’a rien amélioré sur le départ, soupire Jouve. Autant on s’est sentis bien sur les appuis longs, les relances, autant on a eu du mal à exprimer notre puissance sur les premières phases de course, on a perdu nos réflexes. »

L’Équipe enfoncera le clou en rappelant le contexte : « Et dire que, sur cette olympiade, la France avait commencé de rêver en cumulant sept médailles mondiales, dont trois titres (sur distances olympiques). Une embellie qui a fait naufrage dans les eaux d’Eton. »

Arnaud et Sébastien résumeront ainsi les choses pour le journal la Dépêche du midi :  « Tout ce boulot pour si peu, c’est dur, mais on ne peut que s’en prendre à nous-mêmes » et « On n’a pas progressé assez alors que les autres, qu’on avait battus de quelques centièmes pour nos titres mondiaux, vont plus vite. On est extrêmement déçus. »

La déception fut énorme. Nous n’avions pas réussi à retrouver les clés qui faisaient notre force les années précédentes pour franchir un cap durant cette finale. Comment résister à ce déferlement de critiques et d’autocritiques ? Et puis, il y eut la litanie des excuses tout en restant dignes. Arnaud pour Ouest-France : « Désolé pour nos supporters, on n’a pas réussi à aller chercher ce qu’on voulait ». Aujourd’hui, on n’a toujours pas digéré.

Enfin, après dix années de recul (interview de Rudy Coïa de 2022), Sébastien expliquera en substance être responsable de la contre-performance de Londres : «  Je n’ai pas réussi à m’investir suffisamment pendant les courses… Je voulais rentrer au plus vite chez moi… Il ajoutera à l’attention de son équipier : « Malgré cela, jamais Arnaud n’a eu de phrases négatives à mon encontre… »

Il confirmera cette thèse à demi-mots en 2024 dans une autre interview pour l’AIFCK (Amicale des internationaux) : « Mon pire souvenir, c’est bien notre finale aux JO de Londres avec Arnaud où je deviens enragé par cette 4e place. J’avais pressenti que ce pouvait être la pire fin pour notre belle aventure en K2. »

 

L’APRÈS-JO DE LONDRES

Comment rebondir après ce revers cuisant ? La digestion fut difficile. Comment trouver les mots ?… Yvon Robert, le Maire de Rouen, essayera de dédramatiser : « Sébastien était septième à Pékin. Là, il est quatrième à Londres. S’il continue, au Brésil, il aura l’or… » (Journal Paris-Normandie du 13 août 2012).

Après une grosse remise en question, la perspective des Jeux de Rio en 2016 animera notre dernière olympiade. Nos parcours vont quelque peu diverger puisque nous nous préparerons et courrons aux Jeux de Rio dans des bateaux différents. Le K2 200 pour Sébastien et Maxime Beaumont dès 2013 et le K2 1 000 pour Arnaud et Etienne Hubert à partir de 2014. Nous nous retrouverons quand même dans le projet K4 de 2015-16 avec Cyrille Carré et Etienne Hubert mais sans Maxime qui visera l’or sur le K1 et K2 200 m.

Nous ne nous étendrons pas sur cette période qui nous concerne moins en tant qu’équipage dédié au sprint court à la suite de la disparition du 500 m aux Jeux. L’échec de Londres nous aura poussé à rechercher d’autres voies de progrès.

 

Sébastien. C’était ma fin de carrière. Je commençais à avoir d’autres projets notamment la préparation d’une traversée transatlantique en voile. La voile qui est mon autre passion. J’avais deux filles et je voulais aussi m’occuper de ma famille.

Arnaud. Mes plus beaux Jeux sont ceux de Pékin en 2008. Ce fut ma découverte de l’olympisme. De Londres, je ne garde que peu de bons souvenirs pour plein de raisons. L’enjeu n’était pas le même qu’à Pékin, on y allait pour gagner. Au niveau des compétitions par exemple, on a eu du mal à comprendre comment faisaient les Biélorusses pour performer du jour au lendemain. Disons que ce qui jette le doute et provoque la suspicion ce sont les progrès fulgurants de certains adversaires que l’on suit depuis des années. Ce qui m’enrage souvent, c’est de se voir critiqués pour nos supposées erreurs de préparation ou manquements sans prendre en compte l’incertitude liée aux adversaires. Comme si on évoluait dans une bulle bien protégée. Nous, les athlètes, nous faisons au mieux avec nos moyens du moment mais n’avons jamais toutes les cartes en main.

 

LES AVIS D’ARNAUD & SEBASTIEN

SUR L’ÉQUIPAGE

Sébastien. Je suis vraiment passé du monoplace à l’équipage et du 500 au 200 m après les championnats du monde de 2009 car les courses de 500 m sortaient du programme olympique pour Londres. Cette même année, j’avais aussi été vice-champion du monde en K4 1 000 m avec Vincent Lecrubier, Guillaume Burger et Philippe  Colin. On a donc surtout performé au plus haut niveau en équipage. Extrait du Bulletin AIFCK n° 90 (avril 2024) : « Pour moi un bon équipage, ce sont des personnes à l’écoute les unes des autres et qui ont envie de se battre pour les copains. Sans tomber dans les stéréotypes, se dire que l’on est une famille, que l’on a envie de partager. Qu’on a l’envie de se déchirer pour l’autre. C’est ça un équipage. Ne pas courir que pour soi mais pour les autres. ».

L’équipage biplace. — Photo FFCK-KMSP

Arnaud. J’étais dans la même optique que Sébastien en ce début d’olympiade londonienne. À cette époque, on avait une grosse équipe de kayakistes. En 2009, on a été 2 fois finalistes en K2 500 et 1 000 m avec Etienne Hubert mais avec le changement de programme, il a fallu évoluer. Au départ, j’arrivais de la descente et comme avec Étienne, il a fallu avec Sébastien qu’on adapte nos techniques l’un à l’autre. En équipage, j’ai souvent été équipier avant. Avec Sébastien, sur 200 m, voilà en résumé ce que j’en dit lors d’une interview (extrait Ouest-France du 10-08-2012) : « Pour ma part, je suis placé à l’avant, c’est-à-dire que je dirige le bateau avec un gouvernail actionné avec les pieds et je donne le rythme de propulsion. Sébastien, derrière moi, doit s’adapter à ce timing. Il faut qu’il soit hyper-vigilant dans chacun de ses coups de pagaie. »

Sébastien a également été équipier avant lorsqu’il a couru avec Maxime Beaumont pendant l’olympiade de Rio. Quant au K4, il était en position 3 à Rio et Arnaud en 1. Ces positions sont le résultat d’essais successifs.

 

SUR LE SPRINT COURT (200 m)

En 2012, le 200 m est donc devenu une opportunité olympique. Cette distance avait remplacé le 500 m. Heureusement, nous connaissions bien cette épreuve de pur sprint pour y avoir performé depuis plusieurs années. Il faut dire qu’en course en ligne, les programmes mondiaux et olympiques ont souvent évolué. Les JO étant l’objectif ultime, c’est la référence pour faire ses choix de préparation. Dans cette discipline, il faut être assez polyvalent et adaptable (distances et mono ou équipage).

Le travail méthodique en musculation générale (en salle) et spécifique (en bateau), a été déterminant. Les qualités naturelles d’explosivité n’étaient pas suffisantes. C’est une discipline où il faut beaucoup travailler. C’est une évidence mais ne compter que sur ses seules qualités naturelles est loin d’être suffisant.

 

SUR LA TECHNIQUE ET L’ENTRAÎNEMENT

Sébastien. Il n’y a pas qu’une manière de pagayer, ce qui provoque des styles différents. Certains ont des amplitudes très longues. La vélocité c’est aussi important comme de savoir glisser entre chaque propulsion. Le bateau doit absorber l’énergie produite au service de la glisse. Pour optimiser tout cela, il convient de pagayer souvent et beaucoup. Il faut aussi savoir s’écouter et écouter son bateau, sa pagaie, l’eau… C’est un sport à sensations, la sensibilité et la finesse sont des qualités à développer.

Comme beaucoup, nous sommes passés par une phase quantitative importante en termes de volume d’entraînement. C’était rassurant, on avait l’impression de tout faire pour réussir et de contrôler la concurrence. Puis, à la réflexion, overdose après overdose, on s’est rendu compte que de nombreuses séances étaient inutiles car très peu qualitatives. Je ne m’en suis vraiment rendu compte qu’en fin de carrière.

Mon point faible était peut-être la diététique car j’aimais la nourriture donc alimentation pas très équilibrée mais sans excès. J’aurais pu m’améliorer. La préparation mentale, je n’avais pas trouvé la personne-ressource. En revanche, j’étais très attentif au sommeil, aux soins du corps (kiné et ostéo) car mon corps me rappelait à l’ordre très souvent et de l’esprit car mon kiné était de bon conseil.

 

SUR LE MATÉRIEL

Sébastien. C’est un sujet qui me passionne. J’ai cherché à tout optimiser pour me donner confiance puis par passion. Par rapport à la voile que je connais bien, je trouve que notre matériel évolue trop peu. J’ai travaillé sur la forme des bateaux avec Plastex et une université polonaise. Plastex m’a fait de supers bateaux. Nelo m’a démarché pour mes performances, on a essayé d’adapter leurs modèles à mes qualités mais je regrette d’avoir arrêté ma collaboration avec Plastex.

J’ai aussi étudié les manches de pagaie à variation de diamètre avec M.F. TECH pour que leur déformation restitue l’énergie emmagasinée (cf. la perche en athlétisme). Malheureusement, j’ai prêté ma pagaie, on me l’a cassée et je suis revenu aux standards. En K1, j’ai d’abord utilisé une Braca 2 classique puis une « extralight » avec une longueur de 2,19. En K4 1 000, c’était une Braca 2 max classique avec une longueur de 2,22 qui me donnait de l’aisance. Je variais la rigidité du manche en fonction de la distance de course. J’ai aussi réfléchi à la forme des sièges, à un gouvernail plus à l’arrière pour limiter sa traînée…

Anecdote. Pour améliorer la transmission des forces au bateau, j’ai utilisé des chaussures de cycliste fixées au cale-pieds. J’ai chaviré une fois avec les pieds fixés… Ce système a ensuite été interdit, sécurité oblige.

Avec mon expérience et notre capacité d’analyse de données, j’aurais aimé développer moi-même mon matériel plutôt que de suivre les tendances des constructeurs. Côté outil de mesure, on utilisait le minimax mais c’était juste un assistant pour relever les cadences des pagayeurs à l’entraînement. Il convenait de ne pas trop en attendre. Une analyse multifactorielle s’avérait nécessaire car la performance est un équilibre subtil à trouver par chacun en puisant dans ses ressources. Cela dit, il était intéressant de disposer d’un feedback en temps réel ou en différé via l’entraîneur pour s’améliorer. Disposer de data (données), c’est bien mais leur analyse objective et comparative ne s’improvise pas.

 

SUR L’ENTRAÎNEUR

Sébastien. Après les pôles d’Angers et de l’INSEP, le fait d’être passé par Toulouse avec un entraîneur comme Jean-Pascal Crochet ex-descendeur de haut-niveau et d’avoir côtoyé des athlètes comme Arnaud venant également de la descente a permis de faire tomber certains a priori. Là-bas, c’était une ambiance très pro type « camp d’entraînement » mais toute l’année pour construire quelque chose de nouveau. Grosse émulation sur l’eau, on s’entraînait beaucoup. Paradoxalement, en musculation ou en footing, a posteriori, je pense avoir été un peu paresseux.

L’entraîneur, un partenaire important et attentif. — Coll. C. Rouffet

Reprise d’un extrait de l’interview de Sébastien publiée dans le Bulletin AIFCK n° 90 d’avril 2024 : « Pour moi, un entraîneur, c’est quelqu’un qui sait dire les choses quand ça ne va pas. C’est pour moi la première des facultés. C’est quelqu’un qui sait faire son autocritique et qui sait défendre ses athlètes. Un athlète a besoin d’être soutenu contre vents et marées. J’attends de lui de la franchise, la capacité à tirer le meilleur de chaque athlète. ».

Au-delà de cette capacité d’écoute, ce doit être aussi quelqu’un qui sait convaincre et s’imposer quand le besoin s’en fait sentir. En ce qui me concerne, Hervé Duhamel savait bien le faire. L’encadrement et le suivi des entraîneurs sont déterminants. Cette dimension est importante. L’athlète produit une performance dans un cadre, au sein d’une structure et de dispositifs donnés. Personnellement, je ne me serais jamais construit à ce point tout seul. C’est dans cette optique que, sur ma fin de carrière, j’ai été l’un des représentants des athlètes auprès de la fédération qui nous consultait pour valider certaines décisions touchant le haut-niveau. L’un des objectifs étant de préparer au mieux l’olympiade parisienne…

 

Arnaud Hybois & Sébastien Jouve (mai 2024)

Témoignage recueilli par Jean-Paul Cézard

 

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